Mendicité, une nouvelle forme d’esclavage

Lausanne, Pully, et bien d’autres villes de Suisse encore sans doute, sont visitées par des mendiants venus – notamment, dit-on – de Roumanie, voire d’autres pays plus ou moins lointains. Ces malheureux passent des heures accroupis par terre, sur les trottoirs, devant les églises  parfois, emmitouflés dans des manteaux, bonnets et couvertures,  tendant la main ou un gobelet de plastique.
Ils disent – c’est à peu près leur seule connaissance de notre langue – « bonjour, Monsieur » ou « bonjour, Madame », parfois « s’il te plaît, Monsieur », ou « s’il te plaît, Madame ». C’est poignant. Je ne donne jamais d’argent, mais offre parfois de payer à manger (ce qui n’est pas toujours bien reçu, car cela implique que l’on arrête momentanément de mendier, ou alors cela se termine par une liste d’achats considérables dans un magasin : il y a toujours beaucoup d’enfants à nourrir à la maison !). Quoi qu’il en soit, je m’efforce au moins de répondre poliment « bonjour », avec un sourire. C’est une manière de montrer un respect de la personne.

Mais ce respect, ce n’est pas ce qui anime les esclavagistes qui tirent profit de cette mendicité organisée. En effet, il est évident que le malheureux qui ne peut vivre que de la mendicité n’a pas pu s’offrir le voyage pour venir jusqu’en Suisse. Ce voyage, il lui a été payé contre travail, c’est-à-dire contre exploitation de sa misère, en l’obligeant à accomplir une activité dégradante au sens le plus pur, condamnée par la Convention européenne des droits de l’Homme. Il s’agit d’une forme nouvelle de traite des humains, qui peut être sans la moindre hésitation qualifiée de crime contre l’humanité. Comment se fait-il qu’aucune des voix si promptes à s’élever contre la moindre atteinte à la dignité de toute créature ne se fasse entendre contre cette exploitation avérée de la misère humaine ? Comment se fait-il qu’on n’entende jamais parler de mesures prises contre les esclavagistes qui viennent déverser leurs victimes avec des voitures ou autres moyens de transport, qui les répartissent astucieusement dans nos villes, qui les exploitent et les spolient ? Comment se fait-il qu’aucune presse inquisitoire ne se soit encore lancée dans une recherche passionnée des filières, ni ne réclame à cor et à cri la punition de ces actes dignes du pire national-socialisme ? Comment se fait-il qu’on ne lise ni n’entende que nos autorités ont dénoncé ces crimes aux autorités des pays de provenance en demandant une punition des coupables ?

Comment se fait-il qu’on ne puisse rapatrier ces malheureux mendiants dans leur pays d’origine en s’assurant, par des conventions internationales, qu’ils y seront convenablement traités ? Si les pays de provenance de ces malheureux esclaves sont membres de l’Union européenne, ils sont naturellement imprégnés du principe du respect des droits de l’homme et ne sauraient tolérer le trafic de leurs ressortissants. On peine déjà à admettre que des Pays d’Afrique puissent refuser de reprendre leurs propres ressortissants quand on veut les leur renvoyer, fût-ce après une condamnation pénale, il est clair qu’on ne saurait tolérer semblable barbarisme de  la part de Pays membres de l’Union européenne, dont la qualité de membre équivaut précisément à un satisfecit démocratique.

Nos pays dits riches sont d’une faiblesse assez unique quand il s’agit de rechercher les auteurs des filières d’exploitation de la misère humaine (ex. : mendiants ou bien sans papiers). Il n’est certes pas exclu que les enquêtes concernant l’activité mafieuse des trafiquants de cette misère puissent représenter un danger pour la vie de ceux qui enquêteraient, au même titre que les investigations sur les filières de la drogue. Que pouvons-nous faire, comme simples citoyens, pour aider à lutter contre ce fléau sans manquer de respect pour les victimes ni céder au chantage de ceux qui les exploitent?